Le Casier au fond du couloir

16,90 €

BROCHÉ 

Alice Dumas

Fiche technique

Auteur
Alice Dumas
Genre
Roman
Nombre de pages
128
Dimension
152x22.90
ISBN
978-2-38460-114-1
Date de parution
septembre 2024

     Passer, c’…c’est p…pas le j…j... JOUR ! 

   La p…la p…paix, la paix, l’imita Léo, en s’esclaffant. Dé-dé-dé-lé-gué ! Ga…Ga...ston délégué !

   Tu vas où comme ça ? maugréa Kilian en lui barrant la route, alors que Gaston essayait de s’éloigner. 

     Toute cette colère et la frustration de la journée sortirent alors comme un kangourou en rut hors du corps menu du garçon. Il hurla en les bousculant dans tous les sens ; les trois brutus restèrent, quelques secondes, sous le choc, stupéfaits de voir que leur victime préférée réagissait. Gaston en profita pour se jeter sur Kilian et lui asséner un coup sur le visage, sans bien comprendre d’où lui venait soudain un tel courage, mais ses deux acolytes le saisirent par les épaules et le jetèrent contre les casiers. Kilian, furieux, le nez sanguinolant, hurlait entre deux gémissements : « Réglez-lui son compte !!! Ouiche ». 

     Gaston reçut une volée de coups et de gifles qu’il encaissait comme il pouvait. Il avait un goût de sang dans la bouche, un goût de sang et de sel, de toutes les larmes qu’il retenait. Grégorio finit par l’attraper par les cheveux et le traîna jusqu’à son propre casier. Léo attrapa les jambes que Gaston remuait encore de toutes ses forces. Kilian arracha alors la clef que portait Gaston autour de son cou et ouvrit le petit cadenas. Les deux gaillards le balancèrent comme un sac dans le casier et Kilian s’empressa de fermer la porte.

     Gaston entendit le petit clic du cadenas et le rire de ses agresseurs qui eurent le culot de lui jeter la clef, à l’intérieur. La lumière du collège s’éteignit, puis plus rien.

     Ce fut un grand silence.

     Seul, le sifflement de ses poumons qui se remirent à chanter tristement lui tint compagnie. Son souffle devint de plus en plus lourd et de plus en plus rauque. Il avait du mal à respirer. Ça soufflait, sifflait, souffrait dans sa poitrine au son de son cœur emballé. Deux larmes, une de rage, l’autre de désespoir coulèrent sur ses joues sales. Il frappa de toutes ses forces contre la porte, hurla même, mais en vain. Gaston était seul, seul au monde, seul au fond de ce casier sombre. À bout de force, à bout de souffle, tout entier dévoré par une retentissante crise d’asthme, il se laissa aller à son chagrin dans le fond de l’armoire de bois. Il essayait de se cacher, de disparaître, de se fondre dans le bois gribouillé, mais rien n’y fit. Il restait là, prisonnier de son corps, de son casier, de sa vie. 

     Ce qu'il ne vit pas lecteur, dans le noir de la nuit et de la boîte, ce fut cette étrange substance irisée et gluante, tantôt grisâtre, tantôt arc-en-ciel comme de l’essence au soleil qui dégoulinait, sur les parois et Gaston y posa, sans le savoir, les mains. 

     Une étonnante fraîcheur envahit alors son corps secoué par la toux. Ses mains se promenèrent sur son visage en y disposant la matière ; il posa ses doigts sur ses yeux pour essuyer ses larmes et ses yeux s’en emplirent, il se frotta le nez d’un revers de la main, et son nez s’en emplit, il se passa la paume sur les lèvres et les joues et elles s’en emplirent aussi. Il mit sa tête dans ses mains qui descendirent vers son cœur et sa tête et son torse s’en emplirent. À chacun des gestes de Gaston, la substance argentée se déposait sur sa peau et pénétrait en lui, en créant une sensation de calme glacé. Puis le noir se fit… 

 

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